10 mei 2012

Conférence de presse à Liège, Belgique à l’occasion de la présentation du livre: "La Maison d’Arenberg en Wallonie, à Bruxelles et au Grand-Duché de Luxembourg"

terug naar overzicht

Le 10 mai 2012, la Société Littéraire de Liège organisait une conférence de presse en présence de S.A.S le duc d’Arenberg pour présenter le livre "La Maison d’Arenberg en Wallonie, à Bruxelles et au Grand-Duché de Luxembourg. Contribution à l’histoire d’une famille princière".

L’évènement était organisé à l’hôtel Crown Plaza, un bâtiment historique qui avait  appartenu aux La Marck-Arenberg au XVIè siècle.

Les auteurs du livre ont donné une conférence pour présenter le contenu de l’ouvrage :
- Professeur Jean-Marie Duvosquel : présentation générale
- Monsieur Denis Morsa : aspects liégeois

Après le déjeuner-conférence dans les salons de la Littéraire, le duc d’Arenberg a visité une exposition consacrée à Ernest de Bavière au palais Curtius en compagnie de l’échevin de la Culture, monsieur Jean-Pierre Hupkens.

Afbeelding
monsieur Sébastien Dubois, monsieur Michel Firket, 1er échevin et échevin du tourisme, monsieur le bourgmestre de Liège, monsieur Willy Demeyer, S.A.S le duc d’Arenberg, monsieur le président de la Société Littéraire de Liège, maître Olivier Hamal, monsieur Jean-Pierre Hupkens, échevin de la Culture, monsieur le directeur général du Crown Plaza, monsieur Peter Crauwels.

 

Jean-Marie DUVOSQUEL

Présentation du volume

Toutes les familles ont le même âge mais il y en a qui ont laissé des traces plus ou moins lointaines – millénaires parfois comme les Arenberg – en raison de leur rôle dans l’Histoire.
         Arenberg est un modeste village de l’Eifel, à quelques dizaines de kilomètres de la frontière de la Belgique actuelle. Ses seigneurs, qui apparaissent dans les documents au XIe siècle, connaissent une ascension sociale et deviennent burgraves de Cologne. Cette première Maison d’Arenberg s’éteint avec Mathilde qui décède vers 1350. De son mariage avec Engelbert de La Marck elle a un fils qui relève le nom et hérite des biens familiaux : c’est le point de départ de la deuxième Maison d’Arenberg, les La Marck-Arenberg. Même processus trois siècles plus tard quand Marguerite, la dernière héritière La Marck-Arenberg, transmet le nom et le patrimoine au fils qu’elle a eu de Jean de Ligne : la troisième Maison, dont descendent tous les porteurs du nom qui vivent aujourd’hui, s’ouvre donc à la fin du XVIe siècle avec Charles d’Arenberg.
         Les titres portés par les Arenberg évoluent au fil des siècles : simple seigneur de village, burgrave, comte, prince en 1576, duc en 1644, Altesse Sérénissime pour le chef de famille en 1823 et pour tous peu après, ce qui fut confirmé par le roiBaudouin en 1953. La petite seigneurie devint ainsi le siège d’un duché et l’Histoire fit bientôt des Arenberg une famille régnante en Rhénanie.
         Je me suis intéressé à l’histoire de cette illustre famille de façon toute logique. La mort sans postérité de Charles de Croÿ en 1612 fit passer le titre ducal et le patrimoine de cette branche des Croÿ, la plus riche et de loin, à sa sœur Anne, l’épouse de Charles d’Arenberg. Pour préparer l’édition des Albums de Croÿ, il m’a fallu tout naturellement prolonger ma recherche en direction des Arenberg.
         Voilà pourquoi le duc Jean-Engelbert, qui nous a quittés voici quelques mois, confia à mon collègue de la KUL Jan Roegiers la direction  d’un volume sur l’histoire et la présence de sa famille en Flandre, à Bruxelles et aux Pays-Bas, tandis qu’il me demandait d’assumer une mission similaire pour Bruxelles, la Wallonie et le Luxembourg. Dès l’abord, j’ai associé à cette tâche mon ami et collègue Denis Morsa, qui y a investi toute sa compétence et tout son savoir-faire. Ce dessein ducal s’inscrit d’ailleurs dans un projet plus vaste : dès 1987 paraissait le premier volume consacré à l’Allemagne, d’autres sont en chantier pour la France et l’Autriche.


         Comment la famille d’Arenberg est-elle devenue une des grandes Maisons princières de notre pays ?
         Elle s’insinua chez nous par l’évêché de Liège, tout proche de ses racines. Deux La Marck occupent successivement le trône épiscopal durant une bonne moitié du XIVe siècle, non sans favoriser leur parentèle. Erard de La Marck, 150 ans plus tard, fut leur digne successeur, lui qui reconstruisit somptueusement le palais des princes-évêques que nous connaissons aujourd’hui sur la place Saint-Lambert.
         Par une politique matrimoniale et par des achats judicieux, le domaine foncier s’accrut notablement. Confinés jusqu’alors essentiellement dans le pays de Liège et dans le duché de Luxembourg, l’héritage Croÿ  ouvrit aux Arenberg le Hainaut, le Brabant et le Namurois. Au XVIIIe siècle le patrimoine énorme des Gand-Vilain-Isenghien l’étendit en Flandre, dans le nord de la France et en Franche-Comté.
         En 1608, Charles d’Arenberg achète à Henri IV, roi de France, la seigneurie d’Enghien. Ce sera désormais le siège de cette famille qui y aura son château et, jusqu’à nos jours, sa nécropole.
         Après l’acquisition du palais d’Egmont à Bruxelles en 1754 et sa reconstruction presque totale, la famille et son administration se fixa de plus en plus à Bruxelles, partageant son lieu de résidence avec le château d’Héverlée. Il en fut ainsi juqu’à la première guerre mondiale.
         Cette implantation dans presque toutes nos anciennes principautés devait évidemment mener les Arenberg aux plus hautes fonctions. Dès le XVIe siècle, ils sont à la cour de Philippe II et des Archiducs, conseillers et chefs d’armée. Ils occupent durant plusieurs générations le poste de haut-bailli du comté de Hainaut, c’est-à-dire qu’ils en sont les gouverneurs pour ne pas dire les vice-rois. On les retrouve aussi à Namur et à Luxembourg par exemple.
         Ils revêtent des fonctions plus symboliques aussi. Ainsi, ils sont châtelains de Bruxelles dès la fin du Moyen Age. A ce titre, ils avaient une résidence qui devint le palais d’Arenberg, détruit lors du bombardement de Bruxelles en 1695. Il a laissé jusqu’à nos jours son nom à la rue là où se dressait. Erard de la Marck, l’évêque de Liège dont il a déjà été question, y habita occasionnellement : au titre de paroissien de Sainte-Gudule, il a offert à la collégiale le splendide vitrail toujours en place. Mais il y a bien d’autres marques Arenberg à Bruxelles.
         Une des caractéristiques des Arenberg, c’est d’avoir toujours vécu avec son temps, notamment sur le plan économique : propriétaires fonciers et forestiers évidemment, ils se lancent dès la fin du XVIIIe siècle dans les charbonnages et la sidérurgie, au XIXe siècle dans la banque et sont proches de Ferdinand de Lesseps quand celui-ci fonde la compagnie du canal de Suez. Mais Denis Morsa vous en dira plus dans quelques instants.
         Les Arenberg ont été de tous temps de grands collectionneurs. Ils ont hérité en 1612 d’une grande partie des trésors de Charles de Croÿ. On se rend compte de l’ampleur de ces collections au travers d’inventaires, comme les bordereaux des transferts de meubles, tableaux, livres lorsque Philippe d’Arenberg est exilé à Madrid où il meurt en 1640.
         Le palais de Bruxelles au Sablon est au XIXe s. un véritable musée regroupant des pièces importantes d’égyptologie, des antiquités gréco-romaines, des peintures, sculptures, livres et tapisseries que les ducs ouvrent généreusement au public, fait alors exceptionnel. Chez les Arenberg, on conserve tout depuis des siècles : ainsi les costumes sont là aujourd’hui depuis le XVIIIe s. comme les étonnantes partitions musicales.
         C’est dans cette tradition que se situent les initiatives du duc Jean-Engelbert et de ses enfants sous la houlette du duc Léopold. Je me plais à souligner cet engagement tout à fait exemplaire.
         La présentation du volume qui sort de presse aujourd’hui est une nouvelle manifestation de ce mécénat qui prend des formes multiples, depuis l’ouverture des archives aux chercheurs à Enghien jusqu’à l’attribution de prix parmi d’autres activités soutenant l’idée européenne.
         Ce volume est le résultat d’un travail collectif qui doit beaucoup à Denis Morsa et à tous les auteurs qui, par leurs contributions, ont éclairé bien des aspects de l’histoire de la famille et de sa présence à Bruxelles, en Wallonie et au Luxembourg, bien des aspects aussi de son rayonnement sur le plan artistique, économique et politique. Cet ouvrage est une somme non seulement pour l’histoire locale et régionale mais aussi pour l’histoire de la civilisation et pour l’Histoire tout court.

Denis MORSA

La Maison d’Arenberg et le pays de Liège

Évoquer les aspects liégeois de l’histoire de la famille d’Arenberg revient en première instance à braquer le projecteur sur plusieurs épisodes décisifs du passé de l’ancienne principauté épiscopale, derrière lesquels plane l’ombre d’imposantes silhouettes. Se succèdent en effet du Moyen Âge aux Temps modernes une série de personnages flamboyants. Leur galerie est inaugurée par Adolphe de la Marck (1288-1344), dont le frère, Engelbert II de la Marck, avait en 1299 épousé Mathilde d’Arenberg, unique héritière des puissants burgraves de Cologne. Placé sur le trône de saint Lambert grâce à l’intervention du roi de France Philippe le Bel (1313), Adolphe était d’un tempérament violent et emporté. Pénétré des principes du droit romain qu’il avait étudié à l’Université d’Orléans, il entendait exercer sans entraves ses prérogatives souveraines. De telle sorte qu’à peine intronisé, il souleva contre lui une coalition hétéroclite rassemblant les villes de Liège et de Huy, le comte de Looz, le parti des Awans. Rapidement épuisés par la lutte et plus encore par la famine qui sévissait en Europe, les adversaires durent se résoudre à cesser les hostilités et scellèrent la célèbre paix de Fexhe (18 juin 1316), considérée comme le socle constitutionnel de l’État liégeois jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. La paix de Fexhe instaurait le partage du gouvernement entre le prince et le « Sens de pays » (c’est-à-dire noblesse, clergé et villes). Compromis ambigu, le document n’éradiquait pas toutes les sources de tension et Adolphe entra plus d’une fois encore en conflit avec les bonnes villes. Ainsi, en 1331, après avoir réprimé le complot de Pierre Andricas, il édicta un règlement dit « Réformation d’Adolphe », qui instituait pratiquement un état de siège, interdisait les rassemblements de plus de deux personnes et ôtait aux métiers leurs droits électoraux. Le peuple de Liège baptisa ces dispositions de « loi de murmure ». Aussi, en 1343, l’évêque ne put obtenir l’appui de la capitale et du pays pour mater la révolte qui avait éclaté à Huy qu’en consentant à la création d’un tribunal de XXII membres appelés à juger et à condamner les officiers épiscopaux qui auraient enfreint la loi. Cependant, Adolphe ne s’était résigné à cette concession qu’à contrecœur ; c’est pourquoi, dès 1344, il supprima ce tribunal qui manifestait trop ostensiblement la subordination du prince à la loi. Adolphe s’éteignit peu après (3 novembre 1344) en son château de Clermont-sous-Huy, à ce point couvert de dettes qu’on ne lui trouva aucun exécuteur testamentaire.

Son successeur immédiat ne fut autre que son neveu Engelbert (†1368, que les Liégeois préfèrent nommer Englebert), fils d’Engelbert II de la Marck et de Mathilde d’Arenberg. Il avait été recommandé par le roi de France Philippe VI de Valois et fait évêque sans élection capitulaire, par une bulle pontificale. Son règne fut à peine moins agité. Engelbert dut à son tour affronter les villes qui bravaient son autorité. Toutefois, plus diplomate que son oncle, après avoir vaincu la ligue urbaine en Hesbaye, il promulgua la paix de Waroux (1347) qui stipulait que les villes conserveraient leurs lois et privilèges. Les dernières années du principat d’Engelbert furent plus paisibles. Élevé à la dignité d’archevêque de Cologne en 1364, Engelbert renonça à conserver son siège de Liège, mais avait auparavant incorporé le comté de Looz à la principauté (1361).

Les règnes respectifs d’Adolphe et d’Engelbert de la Marck ont une signification considérable sous l’angle institutionnel puisqu’ils constituent le moment où se fracasse le rêve d’installer dans la principauté de Liège un gouvernement personnel de type absolutiste. Néanmoins, les deux dynastes avaient réussi à introduire leur parentèle dans les premiers cercles du pouvoir où elle se maintiendra longtemps.

Franchissons une centaine d’années. Au cours de la seconde moitié du XVe siècle, les annales liégeoises retentissent de l’écho des sanglantes chevauchées de Guillaume Ier de la Marck, souvent qualifié de « Sanglier des Ardennes », mais que ses contemporains appelaient Guillaume d’Arenberg ou Guillaume (à) la Barbe. Fils de Jean d’Arenberg et d’Anne de Virnenburg, ce puîné n’avait reçu qu’un modeste héritage. Il résolut de se tailler au fil de l’épée un patrimoine mieux en rapport avec ses dévorantes ambitions. Guillaume de la Marck projeta sans doute de s’emparer de la principauté de Liège, qu’il eût tôt fait de transformer en une « seigneurie » à l’italienne. Les circonstances favorisaient ses desseins et ses intrigues. La France et la Bourgogne étaient face-à-face, tandis que les Liégeois contestaient ouvertement la politique de leur prince-évêque Louis de Bourbon, qu’ils jugeaient trop favorable à sa famille bourguignonne. Soutien indéfectible du roi de France Louis XI, qui en retour lui procurait armes et argent, Guillaume mènera durant une quinzaine d’années une lutte féroce contre Louis de Bourbon, entrecoupée de réconciliations éphémères. Louis de Bourbon perdit la vie le 30 août 1482 près de Chênée, lors d’un affrontement avec Guillaume de la Marck qui avait été mis au ban de la nation. Celui-ci s’empare de Liège, est proclamé mambour (protecteur) et tente de faire élire évêque son fils Jean, ce qui suscite la candidature opposée de Jean de Hornes, qui sera confirmé en 1483. Abandonné par Louis XI qui avait écarté la menace bourguignonne (et s’éteindra en 1483), Guillaume jugea prudent de se rapprocher de Jean de Hornes. Or, ce dernier n’avait pas oublié le sort réservé à Louis de Bourbon. À l’instigation de son allié l’archiduc (et futur empereur) Maximilien Ier, il attira Guillaume dans un traquenard près de Saint-Trond, le fit promptement juger et décapiter à Maastricht le 18 juin 1485. Après avoir été utilisé par la Couronne de France qui n’éprouva aucun scrupule à se détourner de lui dès lors que sa capacité de nuisance avait perdu tout intérêt. Guillaume fut sacrifié au nom de la raison d’État par les nouveaux maîtres du pays.

La guerre civile qui suivit l’exécution de Guillaume de la Marck laissa la principauté de Liège exsangue. C’est le neveu de Guillaume, Érard de la Marck, qui engagea le pays dans la voie de la restauration matérielle. Né à Sedan en 1472, Érard succéda à Jean de Hornes le 30 décembre 1505 ; on peut, à juste titre, voir en lui le premier prince moderne du pays de Liège et un souverain d’envergure européenne. Friand de prébendes et de bénéfices ecclésiastiques, il réforma l’organisation spirituelle et temporelle de la principauté sans soulever de résistance. Diplomate habile, Érard opta pour la neutralité armée, synonyme de paix. À cette fin, il remit en état les places fortes, dorénavant gardées par des garnisons professionnelles. Par surcroît, il récupéra Bouillon (définitivement perdu au traité de Nimègue en 1678), qui avait appartenu à son arrière-grand-père Evrard II de la Marck-Arenberg (†1440). La sécurité extérieure étant assurée, il se distancia de la France, traditionnelle alliée des la Marck (Érard avait résidé à la cour de Louis XII) et raffermit les liens avec Charles Quint, qu’il contribua à faire élire roi des Romains en 1519 contre François Ier. Mécène fastueux (songeons, entres autres, au buste reliquaire de saint Lambert conservé au trésor de la cathédrale Saint-Paul à Liège ou au vitrail du Jugement dernier offert à l’église Sainte-Gudule à Bruxelles), Érard de la Marck propagea à Liège l’esprit de la Renaissance : il protégea le peintre Lambert Lombard, attira les humanistes, correspondit avec Érasme. Il fit entreprendre la reconstruction du palais épiscopal, que Marguerite de Valois (la reine Margot) tenait pour le plus beau de la Chrétienté. Le monumental édifice console de nos jours les Liégeois, à jamais orphelins de leur antique et majestueuse cathédrale. Érard, entre-temps élevé à dignité d’archevêque de Valence (1520), revêtu de la pourpre cardinalice (1521), fait légat du pape Paul III (1537), souhaitait que son neveu Guillaume de la Marck (dit l’archidiacre de Seraing) lui succède et avait rallié Charles Quint à ses vues. Mais, la mort qui surprit le prélat le 16 février 1538 déjoua le scénario. Le choix se porta sur le niais Corneille de Berghes.

Après le décès d’Érard, les membres de sa lignée quittent le devant de la scène liégeoise. Certes, les la Marck-Arenberg monopolisent jusqu’en 1662 la charge enviée d’avoué de la cité de Liège et certains parmi eux se signalent encore à l’attention, tel Guillaume II de la Marck-Lummen, dit Lumey (†1578), arrière-petit-fils du redoutable Guillaume à la Barbe, qui avait hérité de son aïeul certains traits de caractère. En 1566, il tenta de soulever les Liégeois contre le prince-évêque Gérard de Groesbeeck. Passé au service du Taciturne, ce chef des « Gueux de mer » s’empara en 1572 du port de Brielle en Zélande au détriment des Espagnols et fit mettre à mort les religieux de Gorcum, que l’Église honore comme martyrs. Toutefois, à dater du XVIIe siècle, c’est dans les Pays-Bas catholiques que la Sérénissime Maison d’Arenberg, héritière des immenses possessions de Charles III de Croÿ (†1612), s’attache à consolider son prestige en servant avec une fidélité sans faille, aussi bien dans les organes de gouvernement que sur les champs de bataille, les Habsbourg de Madrid puis de Vienne.

Si le rôle politique des Arenberg au pays de Liège se termine bien avant la chute de l’Ancien Régime, dans la sphère économique en revanche, la famille reste active longtemps après la Révolution et la disparition de l’État liégeois. Les ducs d’Arenberg ont été des acteurs précoces du processus d’industrialisation : mines de plomb de Vedrin, charbonnages dans le Borinage et dans le bassin de Charleroi, minières d’Anzin en France. En région liégeoise, ils sont actionnaires de la société de la Nouvelle Montagne, qui construit une usine de production de plomb et de zinc à Engis en 1844. En outre, au début du XXe siècle, le duc Engelbert-Marie (1872-1949) siège au bureau de l’œuvre mutuelle scientifique d’expansion belge, établie à Liège, qui cherche à promouvoir les réalisations scientifiques du jeune royaume de Belgique et leurs applications industrielles.

La présence séculaire des Arenberg à Liège et dans son hinterland s’est matérialisée par des châteaux, seigneuries et domaines fonciers. Un des principaux éléments du patrimoine rassemblé par les Arenberg dans la partie romane du pays de Liège (la seule envisagée ici) était constitué par la seigneurie d’Aigremont-Awirs, que protégeait un château réputé inexpugnable. Guillaume Ier de la Marck s’y retrancha en 1474, jusqu’au moment où les troupes de Louis de Bourbon prirent d’assaut la forteresse et procédèrent à son démantèlement (partiel). La seigneurie fut aliénée au XVIIe siècle par Albert, prince d’Arenberg et de Barbençon (1600-1674). Le manoir fut rebâti « à la moderne » par l’écolâtre Mathias Clercx dans la première moitié du XVIIIe siècle. La seigneurie de Seraing-le-Château formait un deuxième complexe d’importance. Elle avait été donnée par Louis de Bourbon à Guillaume de la Marck dans l’espoir de s’assurer son alliance et son amitié. On sait ce qu’il en advint. La terre fut vendue au début du XIXe siècle par le duc Louis-Engelbert d’Arenberg (1750-1820) afin de financer la levée d’un régiment de chevau-légers qui s’illustra au sein de la Grande Armée durant les campagnes napoléoniennes. La terre de Hautepenne (aujourd’hui Flémalle) fut quant à elle acquise par les Arenberg en 1765. Auparavant, sa maison forte avait servi à Guillaume de la Marck quand il fut contraint de fuir Aigremont. Le domaine de Hautepenne, séquestré par l’État belge au lendemain de la Première Guerre mondiale, fut racheté en 1926 par un propriétaire privé. À Liège, les Arenberg possédèrent un hôtel (Mont-St-Martin).

On signalera enfin qu’à l’époque de l’établissement des matrices cadastrales de Philippe-Christian Popp (vers 1860), la famille d’Arenberg possédait 259 hectares 61 ares 38 centiares dans la province de Liège, répartis entre les localités d’Engis, Gleixhe, Horion-Hozémont et Saint-Georges-sur-Meuse. Ces biens représentaient 2,31 % de la superficie totale du sol détenue par la Maison ducale en territoire belge (11 225 ha 12 a 62 ca, non comprises les provinces de Namur et de Luxembourg, pour lesquelles il n’existe pas de matrices cadastrales Popp).

Annexe 1: principales charges exercées par des membres  du lignage la Marck-Arenberg dans la principauté de Liège

Époque

Prince-Évêque

Grand mayeur de Liège

Avoué de la cité de Liège

XIVe siècle

Adolphe de la Marck 1313-1344
Engelbert de la Marck 1345-1364

 

 

XVe siècle

 

Guillaume Ier de la Marck-Arenberg 1477-1480
Évrard IV, comte de la Marck et d’Arenberg 1492-1531

Évrard III de la Marck, sire d’Arenberg 1493-1496
Évrard IV, comte de la Marck et d’Arenberg 1498-1531

XVIe siècle

Érard de la Marck 1505-1538

Robert Ier, comte de la Marck et d’Arenberg 1531-1541
Robert III, comte de la Marck et d’Arenberg 1541-1544

Robert Ier, comte de la Marck et d’Arenberg 1531-1541
Robert III, comte de la Marck et d’Arenberg 1541-1544
Marguerite de la Marck, comtesse d’Arenberg 1544-1547 et 1568-1583
Jean V de Ligne, baron de Barbençon et comte d’Arenberg 1547-1568
Robert de Ligne, prince d’Arenberg 1583-1614

XVIIe siècle

 

 

Albert de Ligne, prince d’Arenberg 1614-1662

Évrard II de la Marck (†1440), petit-fils d’Engelbert de la Marck et de Mathilde d’Arenberg, fut deux fois élu mambour de l’évêché de Liège, c’est-à-dire « protecteur de l’Église et défenseur du pays » : d’abord le 28 mai 1418, après la résignation de Jean de Bavière, ensuite le jour des obsèques de Jean de Wallenrode, décédé le 28 mai de l’année suivante.

Guillaume Ier de la Marck contraignit la minorité du chapitre de Saint-Lambert restée à Liège à lui décerner le titre de mambour au lendemain (31 août 1482) de mort de Louis de Bourbon. Cette élection, au cours de laquelle la légalité fut bafouée, était en réalité une usurpation. Guillaume fut excommunié par l’archevêque de Cologne le 23 septembre 1482.

Évrard IV de la Marck (†1531) fut appelé à la dignité de mambour du pays, du 18 décembre 1505 au 30 mai 1508, lorsque la mort de Jean de Hornes ouvrit à son cousin Érard de la Marck la voie du trône épiscopal.

Annexe 2 : Membres du lignage la Marck-Arenberg qui ont siégé à l’État noble de la principauté de Liège

Charles d’Arenberg, prince et comte d’Arenberg (†1616), fils de Jean V de Ligne et de Marguerite de la Marck-Arenberg

Évrard IV, comte de la Marck et d’Arenberg (†1531), fils d’Évrard III de la Marck et de Marguerite de Bouchout

Robert de Ligne, prince d’Arenberg, comte d’Aigremont et de Barbençon (†1614), fils de Jean V de Ligne et de Marguerite de la Marck-Arenberg

Guillaume II de la Marck, seigneur de Lummen et de Seraing-le-Château (†1578), fils de Jean II de la Marck et de Marguerite de Wassenaar

Philippe de la Marck, seigneur de Lummen et de Seraing-le-Château (†1613), fils de Jean II de la Marck et de Marguerite de Wassenaar

Gerelateerd

Sous la direction de Jean-Marie Duvosquel et Denis Morsa

lees verder >

Paris Match: "Liège en fête pour le Duc d'Arenberg"

lees verder >

Gazette de Liège: Histoire de chez nous: Le descendant des princes-évêques

lees verder >

Archives générales du Royaume de Belgique, Bruxelles, 14 decembre 2011

lees verder >